Pour la première fois dans l’histoire du cinéma marocain, le court métrage « Aisha » sera présenté en première mondiale au Festival international du film de Cracovie, en Pologne, l’un des plus prestigieux festivals européens classés parmi les qualifications officielles pour les Oscars.
Ce film de25 minutes, produit de manière indépendante au Maroc avec un budget d’environ 60 000 dollars, aborde de manière audacieuse des questions sociales épineuses à travers une intrigue dramatique qui mêle documentation et imagination, en utilisant une variété de médias visuels, dont 96 % d’action en direct, 4 % d’animation, des séquences de caméra analogique Super 8 et l’incorporation d’éléments documentairesde la vie réelle.
Le film raconte l’histoire de Une adolescente de 17 ans nommée Aisha Elle vit une relation tendue avec sa mère, avant que sa vie ne soit tragiquement bouleversée. L’histoire culmine avec le voyage de la mère vers un rituel soufi kanawipour tenter de rétablir le lien rompu avec sa fille, dans une expérience cinématographique où les frontières de la réalité et de la fictionse croisent, abordant les concepts de perte, de rédemption et d’identité.
Le film s’inspire en partie du cas d’Amina Fellali, une jeune fille marocaine qui a mis fin à ses jours en 2012 après avoir été forcée d’épouser son violeur, un incident qui a suscité une vaste controverse et contribué à la modification de l’article 475 du code pénal marocain.
La réalisatrice a souligné que le film ne suit pas une narration linéaire traditionnelle, arguant que « les traumatismes psychologiques perturbent notre perception du temps et remodèlent notre conscience de soi », ce qui justifie l’adoption d’un style narratif visuel non conventionnel qui mêle harmonieusement la fiction et le documentaire.
Les scènes de rituels soufisont été filmées de manière réaliste et avec la participation réelle des pratiquants, ce qui confère au film une dimension authentique, loin des jeux d’acteurs ou de l’artificialité. L’un des points forts visuels du film est un plan symbolique sur une plage où une femme voilée échange un regard silencieux avec le protagoniste, dans une scène qui fait écho à la célèbre scène du Septième Sceau d’Ingmar Bergman, où la mort, la foi et l’identité personnelle s’entrecroisent dans un moment de profonde contemplation.
« Aisha » représente une nouvelle voix cinématographique qui rompt avec les conventions narratives et crée un espace artistique alliant audace et intimité, dans un miroir artistique qui reflète les tensions culturelles et sociales de la société marocaine contemporaine.